BONJOUR,
Voici un bref portrait de notre sujet :
Émil FURET est né le 10 février 1857 (à 22 H 00) à Saint-Palais-de-Négrignac en Charente-Maritime.
C'est un cultivateur ; il se rend à ses obligations militaires en 1878 (pour 5 ans), soldat au 100ème R.I. Entre décembre 1881 et mars 1882, il est nommé ordonnance du capitaine attaché à l'État Major Général du Ministre de la guerre. Celui-ci dira de lui plus tard : "il avait des idées de grandeur" "il disait qu'une dame riche l'ayant pris en affection devait lui assurer une fortune lors de sa libération du service militaire"
mais, le jeune homme sera libéré avant la date butoir de son service. Ses deux parents venant de décéder. Il n'a plus désormais que ses soeurs comme parents proches.
Il retrouve donc son activité de cultivateur en 1882.
En janvier 1884, il épouse une veuve : Marie ALBERT de 20 ans son aînée.
Il est malgré tout soupçonné de méfaits (disparition d'animaux), vols qui surviennent dans le village, sans que les preuves contre lui soient évidentes.
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Le 25 mars 1886, sa vieille voisine du village de la Font-des-Hérauds, est retrouvée morte dans sa cuisine.
Jeanne BENASSIT est née à POUILLAC en 1800, elle est veuve de Pierre SEBILLAUD depuis près de 30 ans déjà. Son fils Pierre et son petit-fils Jules travaillent non loin de là.
Mais en fin de matinée, elle est retrouvée par un de ses domestiques tombée sur le sol dans sa cuisine. Ce sont les cris du jeune homme qui vont alerter ses fils et petit-fils.
Après le choc de la découverte, les 3 hommes déposent le corps de la mère et grand-mère sur son lit. Pierre SEBILLAUD se rend très vite compte que l'armoire de la chambre est ouverte et que le buffet également a été ouvert. Il sait que sa mère en détient la clef et que cette dernière ne quitte pas sa poche. Ils ont été volés. La famille estime le vol à environ 5 200 francs.
Mais alors ! ...Jeanne BENASSIT n'est pas morte naturellement. Pierre SEBILLAUD s'approche du corps allongé de sa mère, soulève le foulard qui enserre son cou et constate avec effroi les marques déjà foncées sur son corps. Sans nul doute elle a été agressée par le ou les voleurs.
Il faut peu de temps au Juge de Paix pour arriver sur les lieux. Les gendarmes commencent leurs interrogatoires. Leur conviction est qu'il fallait être proche de la famille, avoir travaillé parmi eux pour avoir connaissance des habitudes des SEBILLAUD. En effet, chaque jour, la grand-mère restait seule à la maison ; celle-ci s'enfermait à clef et n'ouvrait qu'aux proches. Elle seule ouvrait l'armoire et ce tiroir dans lequel, elle avait glissé les billets, pièces et autres valeurs qui consistaient la fortune de la famille.
Les gendarmes recherchent donc un proche, un voisin ayant connaissance de ces détails....C'est là que leur regard se tourne vers Émil FURET, 29 ans, ou son beau-frère : Pierre HENRY -39 ans-.
Pierre HENRY époux de Jeanne FURET, la soeur aînée d'Émil, présente une blessure à la main due à un panaris ; le bras en écharpe, il est tenu de rester chez lui.
Émil FURET explique avec beaucoup de détails, aux gendarmes, son emploi du temps du jour mais plusieurs voisins assurent qu'il n'en est rien. Jeanne BOUCHON est formelle, elle ne l'a pas croisé. Eugène BALAN ne l'a pas vu avant 10 H du matin.
Émil FURET a aussi émis la possibilité d'une brouille familiale depuis le départ de la servante ...départ qui aurait chagriné le fils SEBILLAUD qui aurait monté le ton face à sa mère.
Le médecin chargé de l'autopsie affirme que les doigts de Pierre HENRY sont trop gros.....et que malgré une blessure lui ayant atrophié l'index droit, les doigts d'Émil FURET correspondent mieux.
L'homme a vite compris que l'étau de la Justice se resserrait sur lui. Il est arrêté. Mais, Émil FURET est un malin et il profite d'un moment d'inattention pour prendre la fuite.
Il court, il court,Les villageois se mobilisent. Une battue est organisée. FURET est déjà loin, il a couru à travers bois dans les environs de Chaux et après avoir récupéré son argent caché dans sa remise, il se dirige vers la gare de Montendre en direction de BORDEAUX. À son arrivée dans la grande ville, il déjeune, achète un pistolet et se cherche une chambre. Pour expliquer sa venue à son logeur fort curieux, il prétend être là pour un procès qui doit se tenir prochainement.
Le 30 mars, une perquisition a lieu chez lui, en son absence et chez Pierre HENRY également. Les gendarmes trouveront dans le grenier d'Émil FURET des bouteilles d'eau de vie provenant de chez la victime. Interrogée, son épouse ne peut rien expliquer.
Le 5 avril, Émil FURET pense à changer de lieu. Il monte dans un train mais dans le compartiment où il s'installe, il est repéré par Jean PERRIER de Montlieu qui n'hésite pas à avertir les autres personnes qui l'accompagnent : il a reconnu le meurtrier de la femme SEBILLAUD. À Lormont, Jean PERRIER tente de trouver un renfort policier mais le train repart et il ne peut que reporter à plus tard son projet de faire arrêter FURET. Mais l'homme et ses amis seront eux aussi pris de vitesse par Émil FURET qui sautera du train avant son arrivée à Ambarès, se blessant au passage. Les forces de Police sont cependant sur ses traces. Son signalement est diffusé aux autres brigades.
Émil FURET s'arrêtera chez Jeanne BENESSIN à qui il demandera de l'eau pour se toiletter un peu. Elle remarquera les blessures et bosses que le fugitif s'est occasionné en sautant du train. Pour calmer l'inquiétude de la vieille dame, il prétendra s'être fait agressé. Elle ne manquera pas dès lors de l'assister.
Émil FURET décide finalement de revenir à BORDEAUX où il fera la connaissance d'un jeune oisif : Bertrand avec qui il part vers NARBONNE puis PERPIGNAN où durant 10 jours, ils flânent et écument les débits de boisson.
Le 15 avril, il se fera remarquer en importunant plus que de raison une serveuse peu farouche qui l'a laissé entrer chez elle pour y passer un moment. C'est ainsi qu'il sera viré manu militari par le logeur.
Les deux hommes reprennent la route. Mais Émil FURET lassé de la présence de Bertrand à ses côtés, va bientôt se retourner contre ce compagnon de voyage. Par surprise, il l'assaille, le ligote et lui tire une balle dans la tête. Puis il l'abandonne sur le chemin, en lui plaçant dans la main l'arme pour faire penser à un suicide. Il glisse dans sa poche un mot qui explique qu'il est coupable du crime de Saint-Palais et émets des remords.
Le lendemain, 16 avril, Isidore SARDA découvre le corps. Une nouvelle enquête démarre.
BERTRAND serait ainsi l'auteur de ce crime odieux. Mais là encore, le médecin légiste vient contredire le mobile de son geste. Ce n'est pas un suicide ! Impossible dit le médecin. Ses explications tiennent compte de la position du corps à l'opposé de la mare de sang, des gestes inconscients et désordonnés dus à la blessure qui lui auraient fait lâcher l'arme, des marques et blessures aux poignets inexplicables sinon par l'intervention d'un tiers. C'est bel et bien un coup monté.
Les gendarmes pensent que le fugitif finira par donner des nouvelles à sa famille qui a tenté de le protéger. Le courrier qui leur arrive est ainsi filtré. D'ailleurs, une lettre provenant de BORDEAUX et signé d'un certain DURET Louis vient d'arriver à Pierre HENRY. L'adresse qui figure au dos est dès lors mise sous surveillance. Une équipe complète d'agents armés et en civils est diligentée. L'homme est fait.
Le 21 avril, Émil FURET est présenté au Juge d'Instruction à JONZAC. Ses propos sont mensongers. Il nie avoir quitté BORDEAUX. L'argent dont il dispose (5 243 frcs) serait l'argent de son père qu'il lui a légué à son décès, sur son lit de mort. Ses soeurs n'en savent rien. Il n'était pas non plus dans le train d'Ambarès. Puis changeant brusquement de version, il accuse son beau-frère d'être l'auteur du méfait et déclare que ce dernier lui a permis de quitter le village avec l'argent dérobé.
Au final, Pierre HENRY sera également interpellé.
Contre toute attente, le 24 avril, Émil FURET écrit une lettre d'aveux destinée au Juge d'Instruction devant qui il va réitérer ses aveux concernant les deux meurtres.
Durant deux mois, le Juge ira de surprise en surprise. Émil FURET faisant varier à volonté ses versions des faits tant en ce qui concerne le meurtre de Jeanne BENASSIT que celui de son compagnon de route, le dit BERTRAND qu'il accuse d'être le meurtrier de la vieille femme et expliquant que le décès de celui-ci est survenu lors d'une rixe par légitime défense. Le Juge goûtera ainsi à 8 versions des crimes.
Les témoins présentés seront aussi malmenés par FURET. Ils ne les a jamais vus ! jamais rencontrés !
Le procès s'ouvre le 13 août 1886. Les avocats ont des buts diamétralement opposés. Le Jury va trancher aussi net que le bourreau qui sera chargé de la tâche.
Le 11 novembre 1886, au petit matin, Émil FURET, pâle, sans opposition, sera exécuté.
La famille FURET ne sort pas indemne non plus. Jean DÉCOMBE époux de la jeune soeur du condamné, Clémentine, demandera le divorce. Ils s'étaient mariés deux ans auparavant.
Clémentine FURET ira vivre chez Pierre SÉBILLAUD, le fils de la victime où 5 ans plus tard elle mettra un fils au monde.
L'épouse du condamné, Marie ALBERT, quittera le village.
Bonne Lecture,
isalucy23@orange.fr
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