mercredi 31 mai 2023

Philomène Le DIGABEL

BONJOUR, 

Les faits se déroulent à Saint-NAZAIRE, ville portuaire de la Loire Inférieure (devenue Loire Atlantique).

Philomène Gabrielle Mathurine MAINGUY y est née  en 1896 et s'y est mariée par deux fois.....

Aujourd'hui, elle y est condamnée.


Philomène est née le 9 mai 1896 (7 h) à St NAZAIRE, elle a tout juste 17 ans quand elle épouse Joachim DAVID. Le mariage n'est pas pour elle source du bonheur espéré car Joachim DAVID est un homme violent, un buveur qui se permet de la battre à tour de bras. 
Elle aura deux enfants : Jeanne en 1913 -l'année de son mariage- et Joachim en 1915. 
Quand 20 ans plus tard, alors que ses enfants sont grands, qu'elle est veuve, notre ouvrière, songe à se remarier, en 1937, mais elle est devenue ce qu'on peut appeler une alcoolique chronique.  Le médecin chargé de l'observer dira qu'elle est "une buveuse d'habitude".  Elle est, de plus, décrite comme une femme d'une extrême jalousie. 

thème de Philomène

Et le nouvel élu : Raymond LE DIGABEL, est un ancien légionnaire, plusieurs fois médaillé. Il a 7 ans de moins qu'elle ; il est divorcé. Côté santé, il est sujet à des crises de paludisme parfois violentes. Il est chauffeur au Chantier de Penhoët. Il  n'a pas laissé à sa première épouse un très bon souvenir.
Les renseignements qui seront fournis sur la victime seront assez désastreux. Sa première épouse Gabrielle OYAU, témoignera du gâchis de leur union. Laissée souvent seule sans ressources, argent qu'il se réservait pour la caisse du marchand de vins. 
C'est justement celui-ci, le gérant du bar où quotidiennement il se rend, qui seul aura pour "son ami" quelques mots.

Raymond LE DIGABEL est né le 18 août 1902 (6 h) à Saint Nazaire. 

Thème de Raymond LE DIGABEL 

Il épouse en secondes noces Philomène, le 23 Août 1937, sa maîtresse depuis quelques mois.

Le 20 janvier 1938, elle le tue avec le fusil qu'il s'est lui-même acheté et avec lequel, il a pris l'habitude de la menacer. 
Cet achat était prévu -selon lui pour la chasse- mais servait -selon elle- à s'entraîner au tir dans son jardin, en compagnie du tenancier du bar, au grand émoi des voisins. LE DIGABEL tuait les chats et en faisait commerce par la suite.

Ce matin du 20 janvier, il l'aurait menacée avec l'arme ; elle ignorait que le fusil était chargé ; peu après le retour de son époux, vers 11 h 30 une première scène éclate.  Il se serait rendu au café comme à ses habitudes. Sa femme l'aurait rejoint et "aurait fait du potin" ; pour la calmer, les gérants l'auraient invitée à venir boire un verre de porto. Une heure et demie plus tard, il serait rentré chez lui. Une nouvelle scène aurait eu lieu. 
Dix minutes plus tard, un coup de feu a retenti. Ensanglantée, elle s'est rendue chez une voisine, Mme PERRIN, pour dire que son mari venait de se tuer....puis les propos diffèrent : il a eu un accident, il y a eu un accident...
Les gendarmes arrivés sur la scène découvriront une femme ivre, diront-ils, ce que confirmera Mme PERRIN.
La victime avait l'arme entre les jambes. Quelle mise en scène ! s'exclamera le Président de la Cour.
Philomène se défend mal. Elle se rétracte, ment, dit certaines vérités, en réfute d'autres. 

Durant l'audition des témoins, les collègues et commerçantes des Halles, auront pour Philomène  des mots aimables, la présentant comme une sympathique et sobre camarade. Alors que tous décriront son conjoint comme un personnage désagréable


Les jurés ne retiendront pas l'homicide ; ils lui accorderont des circonstances atténuantes et sanctionneront "les coups mortels" ;  Philomène sera condamnée à 5 ans de prison. 

Elle sortira donc libre de recommencer ....sa vie.

Un nouveau mariage en 1946, à PONTCHÂTEAU (44) - le troisième.

Philomène est décédée 7 ans plus tard, le 26 décembre 1953, à Saint NAZAIRE.

Bonne Lecture,

isalucy23@orange.fr

samedi 6 mai 2023

Un féminicide à l'Anglaise

 BONJOUR,

Notre jeune victime est une femme de tout juste 20 ans. Elle est mariée et enceinte de quelques mois.

Un an auparavant, la jeune Suzanne AUDON, fille du syndic des pilotes de ROYAN, n'a que 19 ans et vient d'être nommée institutrice. Un jour de juin 1893 alors qu'elle se promène au bras de sa mère, elle est accostée par un jeune britannique, hardi et quelque peu excentrique, fraîchement rentré d'un voyage en Australie.

Elle ne s'en laissera pas conter. Elle est chaste, née au sein d'une famille modeste, sans fortune mais honorable. Quant au jeune homme, il est assidu ou bien "très collant" à la manière d'une sangsue. Elle le repousse, lui écrit de ne pas revenir à sa rencontre, de ne pas la suivre ni la voir. "on jase ! ". Mais rien n'y fait. Lui, ignorant le refus de sa famille, négligeant les menaces de son père, devant cette mésalliance, la poursuit de ses assiduités.

Le procureur tentera de faire comprendre au Jury dans quel état d'esprit est l'Anglais, noble, millionnaire : une tocade, une passion éphémère qui disparaîtra quand elle sera satisfaite. Il ne tardera pas à démontrer en quoi c'était un caprice. 

Suzanne -qui se croit aimée de ce jeune huluberlu- refuse la proposition effarante autant qu'effrayante de devenir sa maîtresse et de l'accompagner dans ses voyages, ceci afin de sauvegarder la rente dont il bénéficie. Ces subsides disparaitraient  si un mariage avait lieu entre les deux jeunes gens.

Suzanne n'a pas reçu ce genre d'éducation ; elle lui répond sur un billet : 

L'honneur de la jeune fille est un blason sans tâche. 

Si je n'ai pas de noblesse de titre et de naissance, j'ai celle du coeur.

Torturée par cette situation, Suzanne envisage son entrée au couvent. 

Maintenant que vous avez situé notre personnage principal, voyons donc son thème.  Suzanne AUDON est née le 10 Août 1873 à 14 H à Saujon en Charente Maritime. 



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Le jeune homme -fils du Général WITTINGHAM, est bien élevé ; il a reçu une éducation soignée, une instruction complète dans une famille honorable, occupant un rang élevé dans la société, ayant une grande situation de fortune ; il était destiné par son origine et par cette fortune, à rester au premier rang de la société. C'est la description de lui que fera le Procureur de la République, le jour du réquisitoire. 

Il s'en prendra ensuite au grand absent de ce procès : le père de l'accusé, le Général WITTINGHAM, officier à la retraite ayant servi au Canada, 74 ans,  lui reprochant son manque de bonté d'âme, sa porte fermée à celle, honnête et pure, qui venait de contracter mariage avec son fils, Bernard, en Angleterre....allant jusqu'à la calomnier....alors que son propre fils, la veille du mariage (célébré le 16 Novembre 1893) avait eu une "intrigue" dans le train le ramenant en France, avec une certaine Miss MERSELL et qu'il avait passé la nuit avec une "Parisienne" au Casino de PARIS.

Le Procureur mentionne l'avis publié dans les journaux, affiché sur les murs de la ville de ROYAN : 

À partir d'aujourd'hui, je ne paierai plus les dettes de mon fils, Bernard WITTINGHAM et celles de sa femme. Leur prétendu mariage a été contracté à LONDRES, sans mon consentement.

Bernard William WITTINGHAM est averti que tant qu'il aura Suzanne pour femme, il ne pourra percevoir d'argent de la famille. D'où les nombreuses scènes qu'il va faire à son épouse, les propositions de suicide aussi....puisqu'elle refuse de passer pour sa maîtresse (alors qu'elle est son épouse). Lui-même de son côté refuse de la présenter en tant que Mme WITTINGHAM. Suzanne vit un calvaire d'autant que son époux la bat et qu'il est généralement armé. Elle commence à avoir peur de cet époux et elle en parle. Le couple se séparera deux fois. 

La famille WITTINGHAM met la pression sur leur fils, sa mère, dont on dit que c'est une femme douce pourtant, domine ses enfants : 

"Votre mariage ne doit pas être valable. Un voyage vers de lointains climats vous dirigera vers de nouveaux desseins. Rompez tous les liens et votre père vous enverra tout ce que vous pourrez désirer. "

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Suzanne AUDON a une soeur aînée: Jeanne -qui viendra témoigner et défendre sa cause devant la Cour, le jour du procès.-

Le père de Suzanne est mort en février 1894 ; officiellement c'est une bronchite qui l'a emporté. Mais tous pensent que la situation de sa fille, depuis son mariage, y est pour beaucoup.

Ce 18 mars 1894, jour du meurtre, dira le Dr ROUX, Chevalier de la Légion d'Honneur, âgé de 58 ans,  la jeune femme enceinte de 4 mois, paraissait endormie sur le fauteuil, -un pouf recouvert d'une étoffe jaune lilas à fleurs rouges qui sera présenté à la Cour- les jambes légèrement écartées, la tête inclinée vers le bas, le coup de feu a été porté dans sa direction, en oblique, à environ 10 ou 15 centimètres du visage, de haut en bas. Il considèrera la position comme non naturelle pour une morte.  On relèvera les différentes serviettes tachées de sang.

Il ne peut s'agir d'un accident, dira l'expert en balistique, M. Gabriel De luzy De PÉLISSAC,  l'arme est neuve, sans défaut, elle est extrêmement dangereuse mais n'est pas sensible, elle exige une force de deux kilos. Elle ne peut pas partir sans la volonté du tireur. Il lâchera l'arme plusieurs fois sous les yeux ébahis du Président de la Cour pour en faire la démonstration. Aucun coup ne part.

Les experts en psychiatrie diront de Bernard WITTINGHAM,  soupçonné du meurtre de son épouse -sorti du lieu du crime, une valise à la main en déclarant à sa belle soeur croisée à ce moment-là, qu'il avait blessé son épouse- que l'homme ne faisait preuve d'aucune émotion et que son état nerveux n'excluait pas sa responsabilité. 

D'autres ajouteront que c'est un insoumis. On dira malgré tout qu'il avait bon coeur. Sa soeur,  Marie, en larmes, dira qu'il était emporté avec des retours d'affection. 

Pourtant la veille du meurtre, après une longue absence, il arrive par surprise chez sa belle-mère ; le moment d'effusions passé, il s'apprête à lever la main sur sa femme et laisse apparaître une arme nouvellement achetée à LONDRES. 

Devant la consternation de sa belle-soeur, il plaisantera : "c'est pour rire !"   

NON c'est un meurtre avec préméditation ! claironnera le Procureur.

Les crises d'hystérie du mari lors des interrogatoires qui ont nécessitées la venue de médecins, n'étaient en rien des crises d'épilepsie. Comme on dit certains témoins "un excentrique un peu toc-toc" mais pas un aliéné.

La condamnation tombe le 11 août, jour de la Sainte Suzanne. 

WITTINGHAM est reconnu coupable et condamné à 20 ans de travaux forcés. 

Bonne Lecture,

isalucy23@orange.fr

vendredi 5 mai 2023

COEURET

 BONJOUR,

Un manque considérable de FEU anime le thème de ce MERCURIEN Capricorne dominé par l'AIR, dont le SOLEIL est sanctionné par SATURNE avec une Maison 12 particulièrement chargée (4 planètes).


On parle d'une enfance livrée à lui-même avant de répondre à des obligations militaires effectuées en Afrique dans l'Infanterie légère. Il y sera blessé, démobilisé et pensionné. 

Paresseux, chapardeur, voleur, alcoolique, ivrogne, les qualificatifs sont nombreux pour décrire COEURET dont on a oublié le prénom.

Et pourtant, COEURET porte le nom et les prénoms de son père : Gaston Ernest. 

Il est né le 18 Janvier 1894 à 14 H à Vertus dans la Marne. Son père a 25 ans quand il naît et sa mère avec laquelle il n'est pas mariée -car divorcée- en a 37.

Les années ont passé. C'est Noël 1930, Il vient de purger une peine de prison pour avoir asséné des coups volontaires à sa compagne, la femme Benjamin...qui en est morte. 

Le tribunal a été généreux avec lui. Deux ans de prison pour coups volontaires.

En cette veille de Noël 1930, il arpente les rues de Reims, passe de bar en bar, rencontre des femmes. Il aime bien les femmes.

Celle-ci est divorcée..et elle s'appelle Claire. Claire MARIAGE...C'est drôle, Non !  L'occasion de faire un jeu de mots....de mollets, NON... de mots laids. ça y est, elle a ri.  Ils boivent ensemble. De verre en verre, ils prennent un train. Direction Châlons.

Avec cette compagne d'un jour, COEURET propose de chercher une grange ; ils traversent la rue du Camp Attila, croisent, sans lui porter plus attention, le Capitaine GRELET qui se souviendra de ce moment. Le couple se chamaille. 

Apercevant la ferme LOISY, il encourage la jeune femme à le suivre dans la grande pièce noire dont il vient d'ouvrir la porte. Le foin est chaud. Les odeurs d'animaux agressent les narines. Un chat dérangé par la présence de cet homme et de cette femme, sort précipitamment de la grange, heurtant au passage les fourches et pelles laissées là par le fermier après son ouvrage. 

Ils sont ivres et Claire commence à somnoler. Lui s'est allongé sur elle et ses mains larges ont enserré cette gorge blanche. Sans plus. Pas de sexe, pas de viol, juste cette violence.

Il la lâche, sort de la grange et s'en va boire un coup. Quelques heures plus tard, il est ramassé pour tapage et ivresse sur la voie publique. Un soir de Noël, ça fait désordre.

Le 25 décembre 1930, le fermier Paul LOISY en ouvrant sa grange est surpris de trouver une jeune femme allongée dans sa paille. Croyant à une pocharde, il la somme de sortir : "Allez, Debout !"  

Sans réponse de sa part, du bout de sa fourche, il tente de la faire bouger...

Rien. "Occise...Elle est Occise"

La Police est prévenue. L'enquête est brève...pour cause, COEURET dans sa cellule raconte qu'il a tué quelqu'un la nuit de Noël. 

Pourquoi ?  Il n'en sait rien. Peut-être est-il fou ? 

Nonchalamment installé sur les bancs du Tribunal, il est là, impassible à écouter le réquisitoire de l'avocat général avant que la Défense ne fasse sa plaidoirie, ce 6 mai 1931. 


le dessinateur de L'ÉCLAIREUR de l'EST, BLANC, lui a tiré le portrait. (Nvelles Aff. Crimin. de la MARNE)

Il a 37 ans. Il va passer 38 autres années à Saint Laurent de MARONI, en GUYANE, au bagne, en exil. Là-bas, il goûtera au silence de la forêt des collines rincées par les pluies abondantes, à l'isolement, aux moustiques, aux serpents de cette région marécageuse  humide et chaude dans laquelle se complaisent les caïmans et crocodiles.

De quoi vous décourager d'en partir.....


À Perpétuité. Gaston Ernest COEURET y meurt le 30 août 1969.

Bonne Lecture,

Évelyne LUCAS